L’Artisto est un espace culturel tunisien qui propose des cours de théâtre pour des professionnels et des amateurs. Implanté dans un quartier populaire de la capitale tunisienne, il est devenu, depuis son ouverture en 2010, un lieu d’apprentissage et d’épanouissement.
Pour Ghazi Zaghbani, acteur, metteur en scène et directeur des lieux, l’Artisto a été créé pour répondre à un besoin crucial de la scène culturelle tunisienne : le manque d’espaces destinés à la culture. En effet, la Tunisie a connu, dans les dernières années, la fermeture de plusieurs Maisons des jeunes qui constituaient, jusque-là, un espace culturel gratuit au sein de villes et de quartiers où les loisirs manquent cruellement. Dès son ouverture, non loin du centre-ville de Tunis, L’Artisto a commencé à assurer des cours à titre gracieux pour les enfants et les jeunes du quartier. Il a aussi attiré une communauté hétéroclite qui vient pour se former au théâtre à des tarifs très symboliques. « Au début, nous ne suscitions pas trop l’intérêt. Nous avons commencé avec deux ateliers seulement. Actuellement, il y en a 120 », se réjouit Ghazi Zaghbani. Les ateliers en question se veulent un lieu de rencontres culturelles riches en créativité et en relations humaines et en pouvoir d’introspection. Certains viennent pour apprendre à mieux communiquer, pour perfectionner leur manière d’être et de se tenir, pour savoir comment gérer leur stress, être plus performants professionnellement ou moins intimidés dans leur vie personnelle et au quotidien.
Le théâtre au profit de l’épanouissement
À L’Artisto – « théâtre vivant, lieu intimiste doté d’une âme qui vibre au rythme des spectacles, des ateliers, des formations théâtrales et des créations qu’il accueille », comme il se présente sur le site de l’établissement –, le credo est l’épanouissement artistique, et le public qui s’y intéresse est un public large et diversifié. « Nous accueillons des enfants, à partir de 5 ans, des adolescents, des adultes… ici chacun a sa place », explique son directeur. Les élèves adultes viennent ainsi de secteurs professionnels différents. Fonctionnaires, médecins, avocats ou journalistes se dirigent vers les ateliers de L’Artisto, en quête de divertissement, mais aussi d’un état de « déconnexion ».
« Je viens ici pour oublier la fatigue de ma journée », explique Rim, qui suit les cours de théâtre depuis un an. Deux heures par semaine, c’est le temps que certains apprenants s’offrent pour « penser à autre chose », « faire une activité différente » par rapport à leur métier, pour « sortir de la logique de la vie qu’ils mènent » ou de leur métier. Cela se fait au moyen de jeux dramatiques, d’ateliers de création qui permettent d’explorer ses propres capacités artistiques et de sortir de l’ordinaire pour aller vers l’imaginaire.
« Beaucoup de nos élèves sont au départ très introvertis, s’arrêtent à leurs propres limites, des limites qui n’existent que dans leurs têtes et se découvrent par la suite en découvrant tout ce dont ils sont capables », relève Ghazi avec fierté. Avec le théâtre, on apprend selon lui, au fil des exercices, à appréhender la vie autrement.
Le théâtre au profit des professionnels de demain
Mais, à L’Artisto, on vient aussi pour des cours à vocation professionnelle et non uniquement pour le divertissement. Ce lieu de rencontres culturelles est aussi un lieu d’apprentissage du métier d’acteur. Il s’agit du premier cours diplômant privé, précise le fondateur des lieux.
« Nous avons estimé que deux heures par semaine, c’était insuffisant pour ceux qui veulent se spécialiser, poursuit Ghazi Zaghbani. Ceux qui viennent pour des objectifs professionnels disposent donc de cours plus intensifs afin de les rendre prêts, à la fin de leur formation, à exercer le métier d’acteur. Nous avons lancé la première formation professionnelle privée en la matière. » Une quinzaine de personnes ayant suivi des cours intensifs et approfondis, au rythme de trois séances de quatre heures par semaine, constitueront donc la première promotion de l’Atelier de l’Acteur et pourront se retrouver sur les planches dès décembre 2021.La francophonie dans le texte
Mais L’Artisto est surtout cet espace de jeu, de rôles où l’on se découvre acteur, amateur ou professionnel, au fil de situations imaginées et de textes de qualité. Pour le directeur artistique des lieux, il est important de faire jouer aux apprenants des textes qu’ils écrivent eux-mêmes, en groupe ou individuellement, mais aussi de les mettre en situation au moyen de textes théâtraux connus traduits du français vers le dialecte tunisien ou joués dans leur langue d’origine.
« Nous souhaitons être un espace où la passion s’affirme, naît, s’épanouit, où on rencontre des gens qui partagent le même intérêt pour le théâtre, où on se rencontre avec un soi-même qui était jusque-là caché, conclut Ghazi Zaghbani, bien décidé à transmettre sa passion et à mettre son savoir-faire en matière de jeu et de direction d’acteurs au profit du plus grand nombre. J’aime aller dans les régions, explorer les profondeurs de la société tunisienne et aller au plus près des potentielles capacités, découvrir des talents en latence qui n’attendent qu’à être découverts. »
Encadré
Ghazi Zaghbani s’est produit lui-même sur la scène de son théâtre de poche à plusieurs reprises. Il a joué des textes comme La Cantatrice chauve ou La Leçon, d’Eugène Ionesco, Les Bancs de Jean Genet… Il a aussi joué une adaptation de La Solitude des champs de coton, de Bernard-Marie Koltès, Deal (pièce coproduite par L’Artisto et la troupe française Les Yeux de l’Inconnu) où il est, sur scène, aux côtés d’un acteur français (l’un s’exprimant en arabe et l’autre en français).
L’Artisto a aussi produit La Fuite, une pièce déclinée également en film dans laquelle Zaghbani joue le rôle du terroriste en fuite qui se retrouve en quasi-huis clos avec une fille de joie.
Pour en savoir plus : http://www.lartisto.net