Imed Trabelsi au centre de l’actu. Le clan Ben Ali refait surface et ce que l’on constate après le passage télévisé du gendre de Ben Ali, c’est que le malaise vis à vis de ceux qui ont pillé le pays est encore vif.

Son intervention dans le cadre des auditions de l’IVD a remué dans la plaie le tranchant couteau de la corruption et celui de l’impunité. Des noms lancés à demi-mots, un rappel des injustices orchestrées, un aveu des erreurs, une volonté de dénoncer les souteneurs d’un système qui n’a pas cessé d’exister… Imed Trabelsi est le signe des défaillances de la Tunisie par rapport à ce que l’on constate comme abominations mais que l’on ne daigne pas changer.

Les mafieux d’hier ont été réintégrés par la force vile d’une présence médiatique suscitant l’amnésie des téléspectateurs citoyens. Ils ont pu recouvrer ainsi une image publique neuve, astiquée au fil des présences sur plateau et réintégrer la sphère des décideurs politiques et économiques.

Le peuple qui assiste à cette seconde ascension, est, lui, tiraillé entre pardon et rancoeur. Pardonner pour que l’économie reprenne des forces, l’argument qu’on lui avance est faussé par la réalité qu’il constate: les mafieux d’hier sont toujours aussi proche de la sphère du pouvoir qui les attire; pardonner pour des raisons économiques risque de les faire revenir une fois réhabilités vers la politique. Cercle vicieux dans lequel la Tunisie tourne infernalement et qui nous ramène tous vers la case départ.

Même case départ que rappellent les incidents d’El Kamour. Le sud tunisien s’embrase et les champs pétroliers sont la source de la flamme que l’on peine à éteindre. Sont-ce les plus démunis ou les plus aigris qui s’insurgent? C’est du pareil au même. Même s’il s’agit de manifestants payés pour agiter la Tunisie comme veut le présenter la thèse plutôt « complotiste », cela n’en est pas moins révélateur de la défaillance politique. La fragilité du système ne peut être anodine et rien ne pourrait justifier ces faiblesses.

Impliquer l’armée pour calmer les revendications ne fera qu’épuiser un des corps vitaux du pays dans une guerre qui n’est pas censée être la sienne. L’armée a-t-elle à guérir à coup de lacrymogènes les erreurs des politiciens, leur guerre de communication, leurs alliances stratégiques et leurs calculs égocentrés? Les symptômes précurseurs de la crise d’El Kamour étaient bien visibles et la prédisposition là, augurant de soulèvements probables et de population inflammable, de rancune pour le passé et de déception par rapport à une réalité toujours aussi laide, à tous les niveaux. Qu’attend-on d’un peuple dont la patience a été abusée?

Nous sommes encore en transition et les transitions se font sur la durée. Elles sont susceptibles de durer des années, des dizaines d’années. Soit! Mais les rêves que l’on a distribués en guise de promesses électorales, une fois tournant au cauchemar, ne peuvent que susciter l’impatience. Les querelles politiques soldées à force de promesse de changements radicaux ne peuvent qu’engendrer le désenchantement. Et l’on a assez du désenchantement. Cela peut nous faire tourner vers l’ennemi, à défaut d’avoir trouvé un allié en celui qui tient les commandes.

Un Tunisien en est mort aujourd’hui, écrasé, semble-t-il, pendant une manifestation réclamant le travail et la dignité, selon une thèse et cherchant à créer le chaos dans le sud de la Tunisie pour des raisons politiques, selon une autre. Peu importent les raison, un Tunisien est mort aujourd’hui et le chaos est là, guettant le pays pour des raisons occultes peut-être mais aussi pour une autre apparente: L’injustice sociale nourrit tant de vices. Peut-être devons -nous garder cela comme credo en attendant que l’orage passe et que l’on passe à un autre chapitre d’une Histoire qui, pour l’instant, ne fait, à plus d’un égard, que se répéter.

Nous sommes en proie aux querelles politiques, au non-respect des limites, à la goujaterie générale, aux ambitions dévorantes, à l’autisme politique. Ceux au pouvoir en deviennent le maillon le plus faible; la conjoncture les met à rude épreuve jusqu’à les faire éjecter et changer les-uns par les autres n’y changera rien.

Nous sommes condamnés, pour l’instant, au cercle vicieux de la petite histoire. Nous y tournons d’une manière indéfinie en espérant un secours qui peine à venir de nous-mêmes, cette entité aussi multiple qu’à elle-même étrangère.

 

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