Nous sommes à quelques jours des festivités des 6 et 7 février, célébrant, tour à tour, un événement populaire et tragique et un événement présidentiel et festif. Nous célébrerons, non sans émotion, l’an écoulé depuis l’assassinat de Chokri Belaïd. On célébrera, un jour après, à Carthage la Constitution. En attendant, les Tunisiens vivent au rythme d’une série policière à l’américaine, suivant avec intérêt les événements de Raoued.
Le terrorisme, dans ses premières occurrences en Tunisie, avait instauré la terreur et avait alourdi l’ambiance. Il avait choqué de nombreuses personnes et avait marqué les esprits. Aujourd’hui et alors que le pays connaît une lutte sanglante contre des terroristes retranchés en banlieue proche de Tunis, l’optimisme règne.
Il est comme une onde positive qui a frappé les esprits. La passation du pouvoir a eu l’effet escompté. Le gouvernement Jomâa, malgré les quelques réserves qu’il a rencontrées, a été rassurant. Certes, d’un point de vue action, les nouveaux gouvernants n’ont pas encore fait leurs preuves. Mais ils ont été gratifiés par un préjugé favorable faisant que leur simple arrivée à la tête du pouvoir a changé, quelque peu, des choses.
Ainsi, la situation économique s’est vue tirée vers le vert. Dès le lendemain du vote favorable à l’ANC pour le gouvernement Jomâa, la frilosité avait cédé la place à un onde positive réconfortante.
Le FMI a, en effet, annoncé son accord d’attribuer à la Tunisie un crédit de 500 millions de dollars, dès la soirée du 29 janvier. Une somme qui servira à couvrir les dépenses relatives à l’exercice 2013 que le trésor public ne pouvait couvrir. La confiance règne désormais. Elle impactera positivement sur la consommation et sur l’investissement. Le credit default swaps (CDS), à savoir, la prime de risque et de couverture demandée par les investisseurs internationaux, a, à son tour, baissé. Un facteur qui est en soi à la fois révélateur de la stabilité économique, en marche, et de l’évolution vers le positif, en devenir. Ceci ne pourra que rassurer les experts financiers de tous bords, attirant vers la Tunisie des partenaires qui en étaient rebutés.
Selon une déclaration de Mohamed Bichiou, directeur général de la Bourse de Tunis, à la TAP le 28 janvier, la réussite du processus gouvernemental « a entraîné un regain de confiance et offert plus de visibilité aux investisseurs». Le Tunindex avait, en effet, progressé de 1,68% lors de la première séance boursière ayant suivi le vote favorable pour le gouvernement Jomâa. L’attentisme des mois passés a été suppléé par un regain de confiance se reflétant, à court et moyen termes sur l’économie du pays.
Alors quand le terrorisme refait surface, quand il est aux portes de Tunis, quand les fusillades durent près de 24 heures, que des morts tombent dans l’un et l’autre camps, la Tunisie demeure impassible.
Même la commémoration de la mort de Belaïd, un des faits les plus tragiques de l’histoire de la Tunisie, prendra des allures artistiques. Y sont prévues des animations culturelles de genres divers à différents endroits de Tunis.
Le maintien de Jabeur Mejri en prison est jugé anti-constitutionnel par certains. Ce jeune condamné à 7 ans et demi de prison pour avoir partagé sur son compte Facebook une caricature du prophète, n’est toujours pas libéré, malgré la promesse qui lui aurait été faite de partir vers la Suède et donc d’être amnistié sous peu. Cette injustice provoque, cependant, une forme contestataire inédite. Afin de dénoncer l’emprisonnement de Jabeur Mejri, 100 caricaturistes se sont mobilisés pour dire, par leurs planches, leur colère et leur incompréhension quant à un tel jugement.
Le combat mené par les forces de l’ordre contre le terrorisme est à l’ordre du jour. Il vise à mettre à bas un phénomène qui a profité du laxisme des gouvernants déchus pour s’amplifier. Les événements de Raoued permettront au ministère de l’Intérieur et, d’une manière plus large, au nouveau gouvernement, de prouver leur efficacité et de mettre en application les changements récents. La sécurité est en effet le nerf de la guerre. Sans elle, la situation économique et, à travers elle, la situation sociale demeurent précaires. Le gouvernement Jomâa l’a visiblement compris. Il fallait amener une réponse définitive à la question incessante: Qui a tué Belaïd?
La présidence de la République s’apprête à recevoir « les présidents, les rois et les princes » conviés pour la fête du 7 février et les Tunisiens s’apprêtent à célébrer, le 6 du même mois, un an d’impunité pour les meurtriers de Belaïd. En attendant, la Tunisie continue à se débattre contre le terrorisme. Cependant, cette Tunisie on la jauge selon le prisme économique, mais aussi selon le prisme plus subjectif de « la rue ». La rue survit malgré la menace et, à force d’actions, la menace se dissipera.
http://www.businessnews.com.tn/details_article.php?t=523&a=44046&temp=4&lang=
Traduction en anglais sur Al Monitor http://www.al-monitor.com/pulse/politics/2014/02/tunisia-hope-rises-above-threat.html