L’information a été annoncée, hier, en fin de soirée.

Néjiba Hamrouni est décédée le 29 mai 2016, des suites d’une longue maladie. Un dernier combat pour celle qui a consacré sa vie à la lutte pour la liberté de la presse.

L’ancienne présidente du Syndicat National des Journalistes Tunisiens a surtout œuvré pour que le pouvoir n’interfère pas dans le cadre du journalisme, ni comme outil de répression et de pression, ni comme moyen de corruption et d’amadouement.

Néjiba Hamrouni est de ces femmes qui ne sont pas rares en Tunisie, femmes qui croient en une cause et qui se battent pour, malgré tout.

Malgré la pression du pouvoir en place avant la révolution, malgré la haine vouée et ostentatoire des caciques du régime déchu après, malgré les moqueries en relation avec la couleur de sa peau, malgré sa maladie, Néjiba Hamrouni a été comme on la surnomme la lionne d’un secteur que certains avaient intérêt à mettre en cage.

La « Kahina du journalisme », comme l’a surnommé notre confrère du journal La Presse, Abdel Aziz Hali, Madame Liberté de la presse, comme l’a surnommée Frida Dahmani notre consœur de Jeune Afrique, la Doyenne, comme l’appelaient ses collègues, a fait de sa vie une bataille pour son corps de métier.

Un dernier hommage lui a été rendu aujourd’hui au SNJT, lors d’une oraison funèbre chargée d’émotions et de fierté, pour elle, pour nous.

Le corps de Néjiba Hamrouni a trôné dans la salle de réunion du Syndicat des Journalistes, son portrait a été accroché de nouveau aux côtés de celui de Néji Bghouri, actuel président dudit syndicat.

Elle qui avait écrit récemment qu’en se rendant dans les locaux de l’Avenue des Etats Unis, elle avait constaté que son portrait n’y était plus, parmi ceux des différentes figures du journalisme tunisien, ce qu’elle aurait était fière de savoir que c’est en grande famille que les journalistes tunisiens lui ont dit adieu.

Forte est cette image de la famille Hamrouni et de la famille de la presse réunies dans une même salle. Autour du cercueil, mère, sœurs, tantes et en face les journalistes, ses amis, les membres du bureau du SNJT et Néji Bghouri.

Politiques, figures de la société civile, journalistes, techniciens, animateurs, écrivains, ils étaient nombreux à attendre leur tour puis à passer présenter des condoléances aux deux familles de la défunte.

Image forte car elle symbolisait l’union de la presse tunisienne dans ces circonstances tristes et exceptionnelles. Elle symbolisait la force d’un corps de métier qui se reconstruit dans la douleur depuis la révolution. Elle symbolisait l’unité d’un secteur que les différences des-uns et des autres ont fait éclater, à coups de « qui est plus révolutionnaire que l’autre? » et « qui est plus à cheval par rapport à la déontologie que ses confrères? ».

Abstraction faite de ce que les-uns reprochaient aux autres et de ce que certains ont reproché à Néjiba Hamrouni dans le cadre de son mandat de quatre ans à la tête du SNJT, ils étaient nombreux à saluer la battante qu’elle a été. Ils étaient nombreux autour de l’ambulance dans laquelle le cercueil a été transporté vers le cimetière d’Al Batan, à la Manouba, non loin de Tunis.

Partie sous les applaudissements, Néjiba Hamrouni a quitté pour la dernière fois, l’Avenue des Etats-Unis où a retenti, ce midi, une voix féminine qui parlait en boucle de la défunte, de son parcours et de sa personne.

A l’intérieur des locaux, des caméras, des appareils photos, des saluts discrets et des échanges de regards chargés d’émotions, des gorges nouées et les pleurs des membres du SNJT qui l’ont connue de près. Les larmes d’une femme du personnel d’entretien, en tablier bleu et fichu sur la tête, étaient des plus transcendantes, des plus sincères et des moins intéressées.

Paix à l’âme de celle qui a fait de sa vie une guerre pour Nous.

Pensées dépitées pour les trois femmes de kasserine déchiquetées par une mine au mont Sammema alors qu’elles partaient chercher du romarin un certain lundi de mai.

 

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