C’est un discours digne d’une campagne électorale que nous a adressé hier Youssef Chahed. Le Chef du gouvernement a, ainsi, pendant une heure, évoqué, propositions, réflexions, pistes de sortie de crise… Le tout agrémenté de questions-transitions assurant la fluidité d’un message qui semblait bien préparé certes, mais pas ou peu étudié.

Quel intérêt avait Youssef Chahed à s’adresser aux Tunisiens hier. A un mois de sa prise de fonctions qu’avait-il de nouveau à annoncer hormis des projets qui peuvent aboutir ou périr au cours de leur élaboration, réussir ou s’avérer de réels fiascos.

L’on ne cesse pourtant de voir l’ampleur de la morosité qui règne, du côté des citoyens.
L’on ne cesse d’évoquer le péril imminent, du côté des économistes lucides et neutres.
L’on ne cesse de sombrer dans ce pays pour qui le gouvernement d’Union nationale avait été présenté, un certain 2 juin, comme la bouée de sauvetage.

Trop tôt pour le critiquer? Trop tôt pour s’affirmer ainsi, alors, tant que rien n’est fait.
Youssef Chahed a, en revanche, choisi l’image à l’action.
Son discours est tel un accessoire apposé sur du vide. Quelle importance peut avoir un discours politique dans ce contexte actuel? Préparer? On ne l’est que trop…

Le Tunisien ne cesse de réclamer de la rigueur dans la gestion du pays et de la fermeté face à ceux qui lui nuisent. Assurer que changement il y aura? L’heure n’est plus aux promesses et aux résolutions. Rassurer? on ne l’est point. Après les 60 minutes de discours, on ne l’est pas plus ce matin qu’hier.

Youssef Chahed a raté l’occasion de se faire discret et de travailler dans le silence en ne faisant parler de lui que par les actions avérées. Il a choisi les paroles à l’acte.

Son apparition télévisée et radiophonique, c’était plus pour lui que pour nous. Parce que l’orientation de son gouvernement est définie par essence et l’idée de sauvetage en est la raison d’être. Car ce qu’il a annoncé aurait pu l’être par les gérants des portefeuilles concernés. Parce qu’il n’y avait de facto rien au demeurant à mettre en avant.

Youssef Chahed aurait gagné en restant dans ses dossiers et loin des caméras, le temps d’avancer dans ses chantiers et d’avoir de l’accompli dans ses grands axes.

Sa première sortie n’en aurait été que plus glorieuse et son apparition aurait eu l’ancrage souhaité en termes de « notoriété » et d’autorité.

De ses 60 minutes de paroles ne demeurent, ce matin, qu’un brouhaha de critiques quant à la prestation journalistique de ses intervieweurs et une vague d’applaudissement à sa « prouesse » faite de la part de ses admirateurs affichés, ceux qui sont là derrière chaque homme politique comme pour lui fausser sa perception des choses et de lui-même.

Le citoyen en aura-t-il retenu grand chose? a-t-il été touché? A-t-il senti l’impact d’un changement tant actuel et sur le plan politique qu’à venir et sur le plan de son quotidien? Rien n’est sûr…
Quant à l’opposition et à la crainte de ses réactions, c’est un facteur devenu absent dans la configuration actuelle.

Les principales figures dissidentes sont, en effet, impliquées politiquement et d’un point de vue responsabilité. Leur accès à des postes d’Etat, les a fait passer de l’autre côté de la scène et a fait des figurants sans teneur, des vedettes des plateaux d’hier.

En attendant, Youssef Chahed avance comme décidé. Il n’a peut-être pas besoin d’assurer dans l’immédiat. Peut-être travaille-t-il sur le long terme.
Son objectif, ce n’est peut-être pas un projet d’Etat mais l’idée d’un homme d’Etat programmé pour un projet politique.
Au lendemain de sa première grande interview d’après accès à la primature, la politique de Chahed semble encore centrée sur sa personne. Cela se voit un peu trop…

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