L’année 2015 aura été celle du salut recherché, pour la Grèce et pour la Tunisie. Deux pays de la Méditerranée dont les difficultés financières sont quasi similaires, malgré un contexte politique différent dans l’un et l’autre pays. Bouée de sauvetage à ces deux pays tentant de cesser de sombrer : l’Europe et ses institutions financières pouvant faire basculer des balances économiques chancelantes. Bouée de sauvetage, oui, mais à des degrés très divergents. Pourtant, aides, dons et prêts pourraient constituer une alternative de choix pour les pays de l’Union européenne. Topo.

Août 2015, l’Allemagne a validé le troisième plan d’aide à la Grèce, lors d’un vote au Bundestag. Grâce au déblocage d’une tranche d’aide de 23 milliards d’euros, la Grèce a pu honorer un premier paiement à la BCE et rembourser des arriérés au FMI. Le déblocage d’une première tranche d’aide à la Grèce et la validation par le Mécanisme européen de stabilité du «programme pour la Grèce», autant de signaux forts de la part de l’Europe afin d’amener le pays qui sombre vers une issue plus sure. Jeroen Dijsselbloem, président de l’Eurogroupe, avait alors évoqué « un accord ouvrant des perspectives à l’économie grecque et lui fournissant une base pour une croissance soutenable».

D’un point de vue plus « moral » et moins chiffrable, Alexis Tsipras avait sollicité l’implication plus directe dans l’issue voulue à la crise grecque. Dans une lettre adressée au président du Parlement européen Martin Shulz, il avait sollicité la « seule institution européenne investie d’un mandat populaire direct» de devenir un cinquième acteur du quartet des créanciers et lui avait demandé d’être partie prenante dans le cadre de «l’évaluation de la mise en place de l’accord». La difficulté du dossier grec a eu les conséquences que nous avons suivies récemment. Les vents politiques ont tourné, mais les déboires économiques et l’aide de l’Europe au pays voisin en difficulté sont on ne peut plus d’actualité.

Pas très loin de la Grèce, de l’autre côté de la Méditerranée, un autre pays va mal. Les circonstances sont différentes et les raisons ayant engendré lesdites difficultés aussi. Toutefois, le malaise tunisien qui va crescendo et l’aide demandée, promise ou concédée demeure un facteur commun indéniable avec la grèce. Pourtant la Tunisie, ce pays ne mettant pas en péril l’entité européenne et sa cohésion éponyme, ne bénéficie pas des montants faisant l’arrangement des institutions européennes avec la Grèce dont la banqueroute est connue de tous.

L’aide européenne directe à la Tunisie avoisinerait les 186 millions d’euros en 2015. Celle cumulée à la transition démocratique en Tunisie atteint un total cumulé de 800 M€, fin 2015. Quant à la Banque européenne d’Investissement, elle a contribué au financement de plusieurs projets de développement en Tunisie au cours des dernières années. Le montant total avoisinait les 290 millions d’euros en 2014. L’institution financière en question avait alors annoncé, à plusieurs reprises, sa disposition à hausser le niveau des financements, pour qu’il atteigne les 300 millions d’euros. L’aide de la BEI se rattache au secteur social, aux énergies renouvelables et au financement des PME ainsi qu’aux institutions éducatives et celles de formation.

Par ailleurs, 60 % des montants versés par l’Europe sont injectés, chaque année dans le budget de l’État. Ils sont utilisés pour rétablir l’équilibre des comptes publics. Le paiement des salaires des fonctionnaires, étant la première dépense à combler. D’autres sommes permettent la mise en place de différents programmes pilotés par la Commission européenne en collaboration avec des associations tunisiennes ou internationales installées en Tunisie.

Une approche comparative même rapide permet de mesurer l’écart entre l’implication de l’Europe dans la résolution de la difficulté grecque et de celle de la Tunisie. Il est vrai que le premier argument justifiant « l’investissement » européen dans le dossier grec est l’appartenance de ce pays en crise à l’Europe. Le deuxième est incontestablement l’impact d’une telle crise sur les pays de l’Union européenne et sur leur stabilité financière. Toutefois, la Tunisie, pays voisin de l’autre rive, est un allié de longue date. Un partenaire de choix pour un marché européen qui a intérêt à s’étendre.

Les accords conclus avec l’Europe, les différentes facilités dont bénéficient les investisseurs européens, le potentiel que représente la Tunisie qui se reconstruit pourraient être un argument en faveur d’un « plan de sauvetage » plus accru en faveur du pays fleuron des printemps arabes. L’argent injecté n’en sera que plus utile car mis à profit, d’une manière indirecte, pour un pays au potentiel important. Nombreux sont, en effet, les domaines où les compétences et le savoir – faire européens pourraient être utiles et rentables à la fois. L’Europe pourrait donner d’une main et reprendre de l’autre. C’est cela la générosité utile.

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